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Karyl Koindredi, jeune promoteur de la langue drubea en terre de Païta

PAÏTA. Chaque vendredi, nous réalisons le portrait d’un étudiant en fin de cursus. Cette semaine, nous suivons Karyl Koindredi, un jeune de la tribu de N’Dé, qui se destine à la recherche en sociolinguistique.
Écrit le 11 mars 2019

Discret, calme, observateur, humble… Voici les termes pouvant décrire, au premier abord, Karyl Koindredi, assis sur un banc, sur son terrain, à la tribu de N’Dé. Depuis le début de l’année, le jeune Kanak alterne ses loisirs du quotidien : la pêche, la mécanique et l’approfondissement de ses connaissances dans la culture kanak. Résumer son parcours ? C’est l’histoire d’un petit « gars » de la tribu, qui s’est accroché à l’école et a suivi ses objectifs.

En 2009, il entre au lycée Apollinaire Anova. Cette même année, son père, un modèle pour Karyl, décède. Une période difficile s’ensuit. « Ce n’était pas facile, j’ai failli basculer dans la délinquance. Mettre la capuche, me cacher, rester dans mon coin, je me suis dit que ce n’était pas une solution ». L’habitant de Païta ne lâche pas la scolarité, et s’envole pour la Métropole pour cinq mois, en compagnie de sa famille. A son retour, il était « au top. Ça m’a fait énormément de bien et ça m’a aéré l’esprit. Je repartais sur de bonnes bases ». Dès lors, l’étudiant tient à décrocher son baccalauréat. « Je me suis inscrit en filière Sciences et technologies de la santé et du social. L’objectif, c’était vraiment d’obtenir ce diplôme qui ouvre tant de portes, la matière m’importait peu. Car je ne savais pas quoi faire à ce moment-là ». Karyl obtient le fameux sésame au bout de sa troisième année en classe de terminale, la dernière s’est effectuée au lycée du Grand- Nouméa. « J’avais toute la famille derrière moi, il fallait que je réussisse ».

Ses yeux se tournent alors vers l’université de la Nouvelle-Calédonie, un panel de formations s’offre à lui. « Je me suis dit, si j’essayais la licence Lettres option Langues et cultures océaniennes ». Dès la première heure, l’étudiant reste scotché. « Je suivais un cours sur l’histoire du Pacifique. C’était juste “waouh”, je n’ai pas d’autres mots pour décrire ce que j’ai ressenti à ce moment. Ça y est, j’avais trouvé ma voie ». Karyl assiste quasiment à tous les cours et se distingue par son sérieux et sa motivation. « Lors des oraux, je passais tout le temps en premier. Je m’impliquais à fond ».

REDYNAMISER LA CULTURE ET LE DRUBEA À PAÏTA

En troisième année, il travaille sur la langue parlée dans les tribus de Païta, le drubea. L’étudiant décide, en compagnie de son collègue, d’interviewer un sculpteur traditionnel. Ils écrivent alors une chronique dans un magazine, où les propos de l’artiste sont traduits en drubea. De plus, « de manière hebdomadaire, je tenais une chronique radio où les locuteurs s’exprimaient sur la toponymie à Païta ». C’est à ce moment que le jeune Kanak se rend compte de la disparition progressive de la langue vernaculaire et de la culture traditionnelle dans les tribus de la commune. Il s’investit d’une mission. « Je souhaite redynamiser ces deux points chez nous. Il faut que les jeunes s’investissent plus dans les travaux coutumiers et que les parents ne parlent qu’en drubea à la maison. Si nous ne détenons plus ça, c’est une part de nous qui s’évapore. C’est pourquoi je désire poursuivre mes études dans la recherche en sociolinguistique. » Avant d’entamer ce projet ambitieux, avec son Bac + 3 en poche, Karyl a suivi un stage professionnel de trois semaines au CREIPAC, au mois de novembre 2018, pour se parfaire dans la future étape de son parcours. En effet, le jeune homme va s’envoler prochainement pour la Nouvelle-Zélande, où il occupera le poste d’enseignant de français aux étudiants de l’Alliance Française de Palmerston North. « Je participe à cette aventure pour voir autre chose, sortir de mon confort du quotidien. J’espère obtenir un excellent niveau en anglais pour pouvoir lire aisément les études en linguistiques en Océanie des chercheurs anglophones afin de poursuivre mes objectifs ».

Aurélien Pol

BIO EXPRESS

18 décembre 1993
Naissance à Nouméa.

2008
Obtention du Diplôme national du brevet au collège Champagnat.

2009-2012
Poursuit sa scolarité au lycée Apollinaire-Anova.

2013
Obtention d’un baccalauréat ST2S au lycée du Grand-Nouméa.

2014-2017
Poursuite de sa scolarité en licence de lettres option langues et cultures océaniennes et obtention du diplôme à l’issue de la formation.

Novembre 2018
Trois semaines de stage professionnel au Creipac.